Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/126

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— C’est toi, cher Abdiel, répliqua Théophile ; nous voici donc réunis en ce triste monde !… Je suis heureux de te revoir. Pourtant, je te plains, car nous menons ici une dure vie.

Mais Arcade :

— Ami, ton exil finira. J’ai de grands desseins : je veux t’en faire part et t’y associer.

Et l’ange tutélaire du jeune Maurice, ayant commandé deux cafés, révéla à son compagnon ses idées, ses projets ; il exposa comment, de séjour sur la terre, il s’était livré à des recherches peu habituelles aux esprits célestes et avait approfondi les théologies, les cosmogonies, les systèmes du monde, les théories de la matière, les modernes essais sur la transformation et la perte de l’énergie. Ayant, disait-il, étudié la nature, il l’avait trouvée en perpétuelle contradiction avec les enseignements du Maître qu’il servait. Ce seigneur, avide de louanges, qu’il avait longtemps adoré, lui apparaissait maintenant comme un tyran ignare, stupide et cruel. Il l’avait renié, blasphémé, et brûlait de le combattre. Son dessein était de recommencer la révolte des Anges. Il voulait la guerre, espérait la victoire.