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Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/158

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pur. On croyait entendre à la fois le rossignol et les Muses, toute la nature et tout l’homme. Et le vieillard exposait, ordonnait, développait ses pensées en un discours musical plein de grâce et d’audace. Il disait l’amour, la crainte, les vaines querelles, le rire vainqueur, les tranquilles clartés de l’intelligence, les flèches de l’esprit criblant de leurs pointes d’or les monstres de l’Ignorance et de la Haine. Il disait aussi la Joie et la Douleur penchant sur la terre leurs têtes jumelles, et le Désir qui crée les mondes.

La nuit tout entière entendit la flûte de Nectaire. Déjà l’étoile du berger montait à l’horizon pâli. Zita de ses mains jointes embrassait ses genoux ; Arcade, le front dans la main et les lèvres entr’ouvertes, immobiles tous deux, écoutaient. Une alouette, qui s’éveillait tout proche dans un champ sablonneux, attirée par ces sons nouveaux, s’éleva rapidement dans l’air, s’y soutint quelques instants, puis se lança d’un trait sur le verger du musicien. Les moineaux du voisinage, quittant le creux des vieux murs, vinrent se poser en troupe sur le rebord de la fenêtre d’où jaillissaient des sons