Aller au contenu

Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/180

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

terre les émotions des êtres et le tumulte des choses :

— Il est parti, s’écria-t-elle, le monstre ! Il est parti avec elle ! Il a déménagé toute la cambuse et il m’a laissée seule avec un franc soixante-dix dans mon porte-monnaie !…

Et elle exposa longuement et sans ordre que Michel Guinardon l’avait abandonnée pour aller vivre avec Octavie, la fille de la porteuse de pain. Et elle vomit contre le traître des flots d’injures :

— Un homme que j’ai soutenu de mon argent pendant cinquante ans et plus. Car j’ai eu du quibus, moi, et des belles connaissances, et tout. Je l’ai tiré de la misère, et voilà comme il m’en récompense. Il est propre, votre ami ! Un paresseux ! Il faut qu’on l’habille comme un enfant ; un ivrogne !… un être méprisable. Vous ne le connaissez pas encore, monsieur Sariette… C’est un faussaire. Il fait des Giottos, oui, des Giottos et des Fra Angelicos, et des Grécos à tour de bras, monsieur Sariette, pour les vendre aux marchands de tableaux, et des Fragonards, encore, et des Baudouins, donc !… Un débauché, qui ne croit pas en Dieu !… C’est