Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/194

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un amour des richesses qu’on ne peut satisfaire en une société qui ne connaît ni bourse ni banque. Son cœur brûlait d’un ardent amour pour le dieu des Hébreux, auquel il demeura fidèle durant un long âge. Mais au commencement du xxe siècle de l’ère chrétienne, ayant jeté du haut du firmament les yeux sur la France, il vit que, sous le nom de république, ce pays était constitué en ploutocratie, et que, sous les apparences d’un gouvernement démocratique, la haute finance y exerçait un pouvoir souverain, sans surveillance ni contrôle. Dès lors, le séjour de l’Empyrée lui devint insupportable. Il aspirait à la France comme à sa patrie d’élection, et un jour, emportant toutes les pierres fines dont il put se charger, il descendit sur la terre et s’établit à Paris. Cet ange cupide y fit des affaires. Depuis sa matérialisation, son visage n’offrait rien de céleste ; il reproduisait dans sa pureté le type sémitique, et l’on y admirait les rides et les contractions qui plissent les figures de banque et qu’on trouve déjà dans les peseurs d’or de Quentin Matsys. Ses commencements furent humbles, sa fortune insolente. Il épousa une