Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/213

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Quand elle nous obéira nous serons des Dieux. Mais dût-elle nous celer à jamais ses mystères, nous refuser des armes et garder le secret de la foudre, nous devons encore nous applaudir de connaître la douleur, puisqu’elle nous révèle des sentiments nouveaux, plus précieux et plus doux que tous ceux qu’on éprouve dans la béatitude éternelle, puisqu’elle nous inspire l’amour et la pitié, inconnus aux cieux.

» Ces paroles du Séraphin changèrent nos cœurs et nous ouvrirent de nouveaux espoirs. Un immense désir de connaître et d’aimer gonflait nos poitrines.

» Cependant la terre naissait. Son orbe immense et nébuleux s’était d’heure en heure resserré et affermi. Les eaux qui nourrissaient des algues, des madrépores, des coquillages, et portaient les flottes légères des nautiles, ne la recouvraient plus tout entière ; elles se creusaient des lits, et déjà des continents apparaissaient où, dans le tiède limon, rampaient des monstres amphibies. Puis les montagnes se couvraient de forêts, et diverses races d’animaux commencèrent à paître l’herbe, la mousse, les baies des arbrisseaux et les glands des chênes.