Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/189

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Mais nous ne devons en aucune manière, mon fils, regretter cette mauvaise action, car il importait que les prophéties fussent accomplies ; et si ce Pierre ou Céphas n’avait pas fait, cette nuit-là, la dernière des infamies, il ne serait pas aujourd’hui le plus grand saint du paradis et la pierre angulaire de notre sainte Église, pour la confusion des honnêtes gens selon le monde qui voient les clefs de leur félicité éternelle tenues par un lâche coquin. Ô salutaire exemple qui, tirant l’homme hors des fallacieuses inspirations de l’honneur humain, le conduit dans les voies du salut ! Ô savante économie de la religion ! Ô sagesse divine, qui exalte les humbles et les misérables pour abaisser les superbes ! Ô merveille ! Ô mystère ! À la honte éternelle des pharisiens et des gens de justice, un grossier marinier du lac de Tibériade, devenu par sa lâcheté épaisse la risée des filles de cuisine qui se chauffaient avec lui, dans la cour du grand prêtre, un rustre et un couard qui renonça son maître et sa foi devant des maritornes bien moins jolies sans doute, que la femme de chambre de madame la baillive de Séez, porte au front la triple couronne, au doigt l’anneau pontifical, est établi au dessus des princes-évêques, des