Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/246

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seigné sur une de ses passions les plus vives, qui est la jalousie. Ce caractère est commun à toutes ses pareilles. Sachez-le bien, mon fils : les Salamandres ne se laissent pas trahir impunément. Elles tirent du parjure une vengeance terrible. Le divin Paracelse en rapporte un exemple qui suffira sans doute à vous inspirer une crainte salutaire. C’est pourquoi je veux vous le faire connaître.

» Il y avait dans la ville allemande de Staufen un philosophe spagyrique qui avait, comme vous, commerce avec une Salamandre. Il fut assez dépravé pour la tromper ignominieusement avec une femme, jolie à la vérité, mais non plus belle qu’une femme peut l’être. Un soir, comme il soupait avec sa nouvelle maîtresse et quelques amis, les convives virent briller au-dessus de leur tête une cuisse d’une forme merveilleuse. La Salamandre la montrait pour qu’on sentît bien qu’elle ne méritait pas le tort que lui faisait son amant. Après quoi la céleste indignée frappa l’infidèle d’apoplexie. Le vulgaire, qui est fait pour être abusé, crut cette mort naturelle ; mais les initiés surent de quelle main le coup était parti. Je vous devais, mon fils, cet avis et cet exemple.

Ils m’étaient moins utiles que M. d’Astarac