Page:Anatole France - La Vie en fleur.djvu/116

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Ce n’était point un mensonge : j’avais trouvé ces splendeurs culinaires dans un livre de contes du vieux temps et je me persuadais qu’elles seraient renouvelées et agrandies dans le banquet du 28 janvier. Mais Justine ne m’écoutait pas et remuait le charbon avec un bruit si terrible qu’il faisait tressaillir mon père sur son fauteuil, à l’autre bout de l’appartement.

Cependant Mouron, le petit Mouron, doux et modeste, toujours timide, toujours un peu lent de pensée, s’élevait chaque semaine ; un jour même, il se plaça entre Laperlière et Maurisset, à l’étonnement des élèves et de M. Beaussier lui-même. Ce succès était le présage d’un succès plus grand et plus haut. Dans la seconde semaine de janvier, Mouron fut premier en thème grec. Il avait surpassé en expérience de l’iota souscrit Laperlière et Radel et mieux connu les verbes en mi que Maurisset lui-même. La classe entière accueillit le succès de Mouron en imitant joyeusement le chant des petits oiseaux, en faveur de celui qui portait le nom de leur plante favorite, et ces voix bocagères célébrant le héros des verbes en mi firent sourire M. Beaussier lui-même qui les