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Page:Anatole France - La Vie littéraire, IV.djvu/198

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LA VIE LITTÉRAIRE.

commencé par le regretté E. Despois, se continue et s’achève par les soins du plus consciencieux des éditeurs, M. Paul Mesnard. Cet habile homme, à qui rien n’échappe, ne pouvait négliger un rapprochement déjà signalé par divers critiques et, si je ne me trompe, par M. Charles Louandre, dans ses Conteurs français.

On pouvait se demander toutefois si Paul Scarron était bien l’auteur de la nouvelle des Hypocrites et s’il ne l’avait pas prise à un conteur d’au delà des monts, comme c’était assez son habitude. « Scarron, dit l’abbé de Longuerue, copiait beaucoup les auteurs espagnols, mais ils gagnaient beaucoup à passer par ses mains. » À l’origine, le volume qui contient les Hypocrites avait pour titre, à ce que l’on m’assure, Nouvelles tragi-comiques, tirées des plus fameux auteurs espagnols. Cette mention fut retranchée depuis, et j’ai sous les yeux une édition de 1717, chez Michel David, où l’on ne lit rien de semblable. Mais cela n’importe guère. Si l’indication concernant la publication originale est exacte (ce qu’il est très facile de vérifier), Scarron avouait lui-même ses emprunts, sous une forme vague qui ne nous contenterait pas aujourd’hui, mais qui étais très convenable pour un temps où l’auteur d’un livre inspirait moins de curiosité que le livre lui-même. Il se déclarait redevable de ces nouvelles à des conteurs espagnols qu’il ne nommait point et que le lecteur ne se souciait point de connaître par leurs noms. Il semble bien qu’on n’ait point pris garde à cet aveu, qui pourtant était bon à retenir.

Les Hypocrites passèrent pour une œuvre originale