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Page:Anatole France - La Vie littéraire, IV.djvu/25

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xiii
PRÉFACE.

le portait. Cette modestie était profonde et naturelle. On ne vit jamais au monde un homme plus simple, moins ébloui de sa fortune. Il avait gardé la candeur des enfants dans la société desquels il se plaisait aux heures de repos.

Nulle affectation chez cet homme excellent, et s’il s’arrêtait avec complaisance sur quelque endroit honorable de sa vie, cet endroit était celui des débuts laborieux où il avait, par son zèle, secondé son frère Michel. Le seul orgueil qu’il montrât parfois était celui de ses obscurs commencements.

Ce n’est pas ici le lieu de le peindre dans sa famille, où il déploya les plus belles vertus domestiques. Il ne m’appartient pas de le montrer, comme un patriarche, à sa table couronnée d’enfants et de petits-enfants. Les regrets qu’il y laisse ne s’effaceront jamais. Mais il me sera peut-être permis de dire ce qu’il fut pour moi. Il me sera permis de payer ma dette à sa mémoire. Calmann Lévy m’accueillit dans mon obscurité, me soutint, tenta mille fois, avec des gronderies charmantes, de secouer ma paresse et ma timidité. Il souriait à mes hum-