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Page:Anatole France - La Vie littéraire, V.djvu/156

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LE MISSEL DES FEMMES[1]

« Ne renonçons pas à Dieu le père ; ne nions pas la possibilité d’un jour final de justice. » Ainsi parle M. Ernest Renan dans la préface que le Temps a publiée mardi, avant l’apparition du livre qu’elle précède. M. Renan, qu’on juge indifférent et sceptique, parce qu’il est un dogmatiste très doux, croit fermement à beaucoup de choses. Comme un chrétien, il attend le jugement dernier. Mais il craint que ce jugement, dans lequel Dieu s’exprimera pour la première fois avec clarté, ne tarde beaucoup plus que ne pensent les théologiens. Il prévoit que la trompette de l’ange ne répandra pas de sitôt son bruit merveilleux sur les sépulcres des nations. À son avis, ce sera long, très long. Mais il s’en console, par cette considération que pour les morts toutes les éternités accumulées n’ont pas la durée d’un

  1. Feuilles détachées, faisant suite aux Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Ernest Benan (1892).