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ERNEST RENAN

ment est de repasser à cette heure quelques-uns des enseignements qu’il nous a laissés. Il était essentiellement moral et religieux, puisque après que ses croyances furent déracinées il garda sa foi en ces vérités de sentiment qui font la dignité de l’homme et seules donnent du prix à la vie. Il crut que le bien était le bien, et il ne pensa jamais qu’il y eût de la duperie dans la vertu et dans le sacrifice. « Le but de l’humanité, a-t-il dit, n’est pas le bonheur ; c’est la perfection intellectuelle et morale. » Ce dieu qu’il ne reconnaissait plus dans des formules inintelligibles et dans des dogmes obscurs, il le retrouvait dans la nature et dans l’homme, il le reconnaissait dans tout ce qui est beau, dans tout ce qui est bien. Il était optimiste et croyait qu’en définitive le bon l’emportait sur le mauvais ; il aimait cette humanité dont il fut un des plus magnifiques exemplaires.

9 octobre 1892.