Des fauves refoulés qui les voient s’envoler,
Perpétuellement martelés aux enclumes
Du clair et de l’obscur, qui les font s’affoler.
Eux-mêmes frémissants des terreurs qu’ils inspirent,
Malsains énamourés de leur perte sans fin,
Inventeurs de ce dont leurs misères s’empirent,
Écœurés du mortel — exilés du divin.
À chérir innocents, comme, à plaindre, coupables ;
Victimes d’un malaise incurable et formel ;
Quelques-uns irrués aux forfaits improbables ;
Les autres, cachottiers d’un impalpable miel.
La première partie du poème représente la nuit dans la nature, et, pour évoquer une image de goût japonais, la chauve-souris sur la lune. Il a varié infiniment ce thème mélancolique.
Le mystère des nuits exalte les cœurs chastes !
Ils y sentent s’ouvrir comme un embrassement
Qui, dans l’éternité de ses caresses vastes,
Comble tous les désirs, dompte chaque tourment.
Le parfum de la nuit enivre le cœur tendre !
La fleur qu’on ne voit pas a des baumes plus forts…
Tout sens est confondu : l’odorat croit entendre !
Aux inutiles yeux, tous les contours sont morts.
L’opacité des nuits attire le cœur morne !
Il y sent l’appeler l’affinité du deuil ;
Et le regard se roule aux épaisseurs sans borne
Des ombres, mieux qu’au ciel, où toujours veille un œil.
Le silence des nuits panse l’âme blessée !
Des philtres sont penchés des calices émus ;
Et, vers les abandons de l’amour délaissée,
D’invisibles baisers lentement se sont mus.