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Page:Anatole France - Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1896.djvu/217

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du tout à ce que mademoiselle Préfère ait raison en quoi que ce soit.

— Et bien ! soyez satisfait, Jeanne : mademoiselle Préfère n’avait pas raison.

— Si ! Si ! elle avait bien raison. Mais je voulais aimer tous ceux qui vous aiment, tous sans exception, et je ne le peux plus, car il ne me sera jamais possible d’aimer mademoiselle Préfère.

— Jeanne, écoutez-moi, répondis-je gravement, mademoiselle Préfère est devenue bonne avec vous, soyez bonne avec elle.

Elle répliqua d’un ton sec :

— Il est très facile à mademoiselle Préfère d’être bonne avec moi ; et il me serait très difficile d’être bonne avec elle.

C’est en donnant plus de gravité encore à mon langage que je repris :

— Mon enfant, l’autorité des maîtres est sacrée. Votre maîtresse de pension représente auprès de vous la mère que vous avez perdue.

À peine avais-je dit cette solennelle bêtise que je m’en repentis cruellement. L’enfant pâlit, ses yeux se gonflèrent.

— Oh ! monsieur ! s’écria-t-elle, comment pou-