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Page:Anatole France - Le Crime de Sylvestre Bonnard, 1896.djvu/228

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Retournés à Venise, nous faisions la connaissance d’une patricienne vêtue d’une dalmatique brodée, quand j’entendis la sonnette. Je crus que c’était quelque patronnet avec sa manne, mais la porte de la cité des livres s’ouvrit et…… Tu souhaitais tout à l’heure, maître Sylvestre Bonnard, que d’autres yeux que des yeux lunettés et desséchés vissent ta protégée dans sa grâce ; tes souhaits sont comblés de la façon la plus inattendue. Et comme à l’imprudent Thésée, une voix te dit :

Craignez, Seigneur, craignez que le Ciel rigoureux
Ne vous haïsse assez pour exaucer vos vœux.
Souvent dans sa colère il reçoit nos victimes,
Ses présents sont souvent la peine de nos crimes.

La porte de la cité des livres s’ouvrit et un beau jeune homme parut, introduit par Thérèse. Cette vieille âme simple ne sait qu’ouvrir ou fermer la porte aux gens ; elle n’entend rien aux finesses de l’antichambre et du salon. Il n’est dans ses mœurs ni d’annoncer ni de faire attendre. Elle jette les gens sur le palier ou bien elle vous les pousse à la tête.

Voilà donc le beau jeune homme tout amené et je ne puis vraiment pas l’aller cacher de suite,