Page:Anatole France - Le Génie latin.djvu/46

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servit trop loyalement, vivait alors avec son jeune frère et sa sœur d’Escars sur une terre de famille. Cette belle et sage Marie, héroïne innocente, abaissa ses adorables yeux bleus sur le poète impotent. Elle ressentit pour lui de la pitié et lui montra de l’intérêt. D’ailleurs les vers burlesques ne lui déplaisaient pas, et le poète ne lui ménagea pas les épîtres.

Une troupe très délabrée de comédiens vint au Mans pendant que Scarron y était. On alluma les chandelles dans un tripot pour jouer la comédie. La troupe fit quelque bruit dans la ville ; il y eut, à l’ordinaire, des princesses chatouillées, des galants souffletés, des bouteilles vidées, des sottises dites, des coups, des baisers. Le cul-de-jatte s’amusa beaucoup de ce train ; il en vit assez pour en faire un livre.

Lui-même travaillait pour les comédiens. Il donna en 1646 deux pièces au théâtre français. Il imagina le type de Jodelet ; il savait suivre un caractère, et le comique ne lui manquait pas.

Il quitta la maison canonicale en 1646 et revint à Paris, où tous ses maux le suivirent fidèlement. Il avait bien, comme il disait, son marquisat de Quinet. Il faut savoir que Nicolas Quinet, libraire juré sur les degrés de la Sainte-Chapelle, proche la boutique de Nicolas Barbin, vendait les œuvres de Scarron. Mais ce marquisat littéraire rapportait peu de chose. Par bonheur Mme de Hautefort était rappelée à la cour.

La cour donnait volontiers des emplois et des charges aux hommes de lettres. La reine, également élevée au-dessus des nobles et des bourgeois, n’avait pas pour