Page:Anatole France - Le Génie latin.djvu/48

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zarin en fuite. On était content, on chantait, sans souci du lendemain. C’était la Fronde. Le mot, parti on ne sait d’où, fut accepté par tout le monde. Être frondeur, cela sentait le mauvais garçon, le beau joueur du mail qui rosse le guet, et les Parisiens étaient fiers d’être des frondeurs. Scarron, Parisien comme pas un, du haut de son escabeau humait cet air de révolte qui montait de la rue. Il entendait les charretiers sur la chaussée crier à leurs chevaux : Hue ! Mazarin ! et les frapper de bon cœur. Et lui-même, partageant l’enthousiasme public, était, sur sa sébille, un frondeur déterminé. Si un exemplaire du Typhon traînait encore sur sa table, il pouvait y lire les louanges qu’il avait jadis peu marchandées au cardinal :

Jules plus grand que le grand Jules,
Alcide sur lequel l’Atlas peut s’accouder.



Mais Jules ne payait plus. Scarron n’était pas ingrat ; mais il était bien étourdi. D’ailleurs, il tenait bureau de nouvelles. La Fronde en personne lui faisait visite chaque après-dîner. Le coadjuteur (c’est tout dire) le venait voir tous les jours et s’asseyait sur le petit lit de satin jaune, en compagnie de son Marigny, abbé de cour, coureur de ruelles et beau frondeur. On lisait là tout ce qui se faisait de mieux contre le Mazarin. La Mazarinade parut d’abord, puis vinrent, sous divers titres, mille et mille autres mazarinades. Ce premier libelle, répandu par la ville, apprit aux grandes dames et aux laquais les amours du Mazarin avec une fruitière d’Alcala et la bastonnade que reçut ledit Mazarin à ce sujet. On peut porter la pourpre et