Page:Anatole France - Le Jardin d’Épicure.djvu/58

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il contente le plus grand nombre. C’est aussi pourquoi il plaît médiocrement aux esprits rêveurs et méditatifs. Ceux-là n’aiment les idées que pour le prolongement qu’ils leur donnent et pour l’écho mélodieux qu’elles éveillent en eux-mêmes. Ils n’ont que faire dans un théâtre et préfèrent au plaisir passif du spectacle la joie active de la lecture. Qu’est-ce qu’un livre ? Une suite de petits signes. Rien de plus. C’est au lecteur à tirer lui-même les formes, les couleurs et les sentiments auxquels ces signes correspondent. Il dépendra de lui que ce livre soit terne ou brillant, ardent ou glacé. Je dirai, si vous préférez, que chaque mot d’un livre est un doigt mystérieux, qui effleure une fibre