Page:Anatole France - Le Livre de mon ami.djvu/322

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nous croirons les saisir. Elles sont faites d’un rayon de lune. Le bruissement des feuilles trahit seul leur passage, et leur voix se mêle aux murmures des fontaines. Si l’on ose saisir un pan de leur robe d’or, on n’a dans la main qu’une poignée de feuilles sèches. Je n’aurai point l’impiété de les poursuivre ; mais leur nom seul nous révélera le secret de leur nature.

Fée, en italien fata, en espagnol hada, en portugais et en provençal fada et fade ; fadette dans ce patois berrichon qu’illustra George Sand, est sorti du latin fatum, qui signifie destin. Les fées résultent de la conception la plus douce et la plus tragique, la plus intime et la plus universelle de la vie humaine. Les fées sont nos destinées. Une figure de femme sied bien à la destinée, qui est capricieuse, séduisante, décevante, pleine de charme, de trouble et de péril. Il est bien vrai qu’une fée est la marraine de chacun de nous et que, penchée sur son berceau, elle lui fait des dons heureux ou terribles qu’il gardera toute sa vie. Prenez les êtres, demandez-vous ce qu’ils sont, ce qui les fait et ce qu’ils font ; vous trouverez que la raison suprême de leur existence heu-