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maison, existant avant lui, était mentionnée dans un titre de 1690, sous le nom de maison de bouteille. Dans une salle du rez-de-chaussée, se trouvaient encore, au fond des armoires blanches, sous un treillage, les livres réunis par Jean Le Ménil. Sa tante de Lannoix, disait-il, avait voulu les mettre en ordre. Elle y avait trouvé des ouvrages légers, ornés de gravures si libres, qu’elle les avait brûlés.

— Elle est donc bête, votre tante ? dit Thérèse.

Depuis longtemps les histoires de Madame de Lannoix l’impatientaient. Son ami avait en province une mère, des sœurs, des tantes, une nombreuse famille, qu’elle ne connaissait pas et qui l’irritait. Il en parlait avec admiration. Elle en prenait de l’humeur. Elle s’impatientait des fréquents séjours qu’il faisait dans cette famille, et dont il rapportait, à ce qu’elle imaginait, une odeur de renfermé, des idées étroites, des sentiments qui la blessaient. Et, de son côté, il s’étonnait naïvement et souffrait de cette antipathie.

Il se tut. La vue d’un cabaret, dont les vitres flambaient à travers les grilles, lui rappela tout à coup le poète Choulette, qui passait pour ivrogne. Il demanda avec un peu d’humeur à Thérèse si elle voyait encore ce Choulette, qui lui faisait des visites en macfarlane, un cache-nez rouge par-dessus les oreilles.