Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/345

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dans le gémissement faible des feuilles. Au delà du rideau magnifique des ormes, s’étendaient les halliers coupés de bouquets de trembles et de bouleaux, dont l’écorce pâle s’allumait d’un dernier rayon de soleil.

Il la pressa dans ses bras et lui mit des baisers sur les paupières. La nuit descendait du ciel, les premières étoiles tremblaient entre les branches. Dans l’herbe mouillée soupirait la flûte des crapauds. Ils n’allèrent pas plus avant.


Quand elle reprit avec lui, dans la nuit, le chemin du château, il lui restait aux lèvres un goût de baisers et de menthe, et dans les yeux l’image de son ami qui, debout au tronc d’un bouleau, semblait un faune, tandis que, soulevée dans ses bras, les mains nouées à la nuque, elle se mourait de volupté. Elle sourit sous les tilleuls aux nymphes qui avaient vu les larmes de son enfance. Le Cygne élevait dans le ciel sa croix d’étoiles et la lune mirait sa corne fine au bassin de la Couronne. Les insectes dans l’herbe jetaient des appels d’amour. Au dernier détour de la muraille de buis, Thérèse et Jacques découvrirent la triple masse noire du château, et par les grandes baies du rez-de-chaussée, ils devinaient, dans la rouge lumière, des formes qui se mouvaient. La cloche sonnait.