Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/40

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troubla, lui fit revivre les heures enchantées des premiers désirs et des craintives espérances. Il lui chercha la main dans son manchon et pressa le poignet mince sous les fourrures.

Une fillette, qui portait des violettes sur une claie jonchée de branches de sapin, reconnut des amoureux et vint leur offrir des fleurs. Il lui prit un bouquet de deux sous et l’offrit à Thérèse.

Elle allait vers la cathédrale. Elle songeait : « C’est une bête énorme ; une bête de l’apocalypse… »

À l’autre bout du pont, une bouquetière, ridée, barbue, celle-là, grise d’ans et de poussière, les poursuivit avec son panier chargé de mimosas et de roses de Nice. Thérèse, qui tenait en ce moment ses violettes à la main, cherchant à les glisser dans son corsage, répondit gaiement aux offres de la vieille :

— Merci, j’ai ce qu’il me faut.

— On voit bien que vous êtes jeune ! lui cria d’un ton canaille la vieille, en s’éloignant.

Thérèse comprit presque tout de suite, et il lui vint aux lèvres et à l’œil un petit sourire. Ils passaient dans l’ombre du parvis devant les figures de pierre qui, rangées aux embrasures, portaient des sceptres et des couronnes.

— Entrons, dit-elle.

Il n’en avait pas envie. Il éprouvait confu-