Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/217

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— Il ne faut toucher aux choses de l’armée qu’avec une extrême prudence, dit M. de Terremondre. L’armée, c’est la sécurité et c’est l’espérance. C’est aussi l’école du devoir. Où trouver ailleurs que chez elle l’abnégation et le dévouement ?

— Il est vrai, dit M. Bergeret, que les hommes tiennent pour le premier devoir social d’apprendre à tuer régulièrement leurs semblables et que, chez les peuples civilisés, la gloire du carnage passe toutes les autres. Après tout, que l’homme soit incurablement méchant et malfaisant, le mal n’est pas grand dans l’univers. Car la terre n’est qu’une goutte de boue dans l’espace, et le soleil une bulle de gaz bientôt consumée.

— Je vois, répliqua M. Frémont, que vous n’êtes pas positiviste. Car vous traitez légèrement le grand fétiche.

— Qu’est-ce que le grand fétiche ? demanda M. de Terremondre.