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Page:Anatole France - Le Petit Pierre.djvu/111

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dans la belle rue du Bac, c’étaient les boutiques pleines d’objets merveilleux par la forme et la couleur, mille ouvrages de tapisserie, du papier à lettres chiffré d’or et d’azur, des lions et des panthères sur des descentes de lit, des figures de cire artistement coiffées, des biscuits de Savoie dont le dôme, pareil à celui du Panthéon, portait une rose épanouie ; c’étaient enfin des petits fours prodigieux, en façon de tricorne, de dominos, de mandoline. En me faisant voir ces merveilles, ma mère me les rendait d’un mot plus merveilleuses encore. Elle avait ce don rare d’animer toutes choses et de faire naître des symboles.

Il y avait alors dans cette rue, au coin de la rue de l’Université, un marchand de tableaux chez qui l’on pénétrait par une porte assez étroite, peinte en jaune et décorée dans le style du temps, non sans richesse. De la corniche qui la surmontait je ne dirai rien, n’en ayant gardé nul souvenir ; mais il est certain qu’aux deux consoles qui supportaient cette corniche s’adossaient des figurines longues comme le bras, bizarrement composées de parties empruntées à l’homme, au quadrupède et à l’oiseau. Ce n’étaient pas proprement des