Page:Anatole France - Le Puits de sainte Claire.djvu/277

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gémir et de se lamenter, en songeant qu’il s’en fallait de vingt-quatre heures qu’une année entière ne se fût accomplie depuis le jour qu’il avait reçu les cinq cents ducats du juif Eliézer. L’idée de manquer à sa promesse et d’exposer sa caution aux reproches du circoncis lui était intolérable. Madame Loreta lui ayant demandé la cause de son désespoir, il la lui fit connaître. Et comme elle était d’une grande piété et très dévote à la sainte Mère de Dieu, elle s’affligea avec lui. La difficulté n’était pas de trouver les cinq cents ducats. Il y avait dans la ville voisine un banquier qui gardait depuis six mois une pareille somme à la disposition de Fabio. Mais aller de la côte de Dalmatie à Venise en vingt-quatre heures, sur une mer démontée et par des vents contraires, il n’y fallait pas songer.

— Ayons d’abord la somme, dit Fabio.

Et quand un serviteur de son hôtesse la lui eut apportée, le noble marchand fit amener une barque tout proche le rivage ; il y mit les sacs contenant les ducats, puis il alla quérir dans l’oratoire de Madame Loreta une image de la Vierge avec l’enfant Jésus, qui était de bois