Aller au contenu

Page:Anatole France - Le Puits de sainte Claire.djvu/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’en a pas plus de souci que des rencontres que ce petit chien, que tu vois dormant au pied de mon lit, peut faire dans la rue. Et, dans le fait, ce sont des choses indifférentes, à la condition de n’y donner soi-même aucun prix.

Messer Betto quitta la place, un peu piqué de ces dédains. Il gardait à son ami la plus vive tendresse, mais il ne crut pas devoir le prier trop instamment aux fêtes et aux jeux qu’il donna pendant tout l’hiver avec une merveilleuse libéralité. Cependant les gentilshommes de sa compagnie ressentaient impatiemment l’injure que leur faisait le fils du seigneur Cavalcante de’ Cavalcanti en refusant de frayer avec eux. Ils commencèrent à le railler sur ses études et ses lectures, disant qu’à force de se nourrir ainsi de parchemin, comme les moines et les rats, il finirait par ressembler aux uns et aux autres, qu’on ne lui verrait plus qu’un museau pointu et trois grands poils de barbe sous une capuce noire, et que Madonna Gemma elle-même s’écrierait à ce spectacle : « Ô Vénus, ma patronne ! en quel état les livres ont mis mon beau saint Georges ! Il n’est plus bon qu’à