Page:Anatole France - Les Contes de Jacques Tournebroche.djvu/72

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les ennemis sont entrés, tout est perdu ! » Ces clameurs pénétraient jusque dans les églises où les gens de bien chantaient vêpres. Ils s’enfuirent épouvantés et coururent s’enfermer dans leurs maisons. Or, ceux qui allaient ainsi criant étaient des émissaires de messire Charles de Valois. En effet, dans ce même moment la compagnie du maréchal de Rais donnait l’assaut contre le mur, proche la porte Saint-Honoré. Les Armagnacs avaient apporté dans des charrettes de grandes bourrées et des claies pour combler les fossés et plus de six cents échelles pour l’escalade. La Pucelle Jeanne, qui n’était point telle que croyaient les Bourguignons, et qui, tout au contraire, menait une vie pieuse et observait la chasteté, mit pied à terre et descendit la première dans un fossé qui se pouvait aisément franchir, car il était à sec. Mais on se trouvait ensuite exposé aux flèches et aux viretons qui pleuvaient dru des murs. Et l’on avait devant soi un second fossé large et plein d’eau. C’est pourquoi la Pucelle Jeanne et les gens d’armes étaient bien empêchés. Jeanne sondait le