Page:Anatole France - Les Opinions de Jérôme Coignard.djvu/150

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qu’enfin il est déjà merveilleux que des gens enfermée dans des murailles ne s’y entre-dévorent pas. C’est un bonheur qu’il faut attribuer à leur poltronnerie. La paix publique est fondée uniquement sur le faible courage des citoyens qui se tiennent en respect les uns les autres par la peur qu’ils se font réciproquement. Et le prince, en inspirant à tous l’épouvante, leur assure l’inestimable bienfait de la paix. Quant à vos échevins, dont le pouvoir est faible, et qui ne sont pas capables de vous nuire ni de vous servir beaucoup, et dont le mérite consiste surtout dans leur grande canne et leur perruque, ne vous plaignez point trop de ce qu’ils soient choisis par le roi et placés, peu s’en faut, depuis le dernier règne, au rang d’officiers de la couronne. Amis du prince, ils sont les ennemis de tous les citoyens indistinctement, et cette inimitié est rendue supportable à chacun par l’égalité parfaite avec laquelle elle se répand sur tous. C’est une pluie dont nous ne