Page:Anatole France - Pierre Nozière.djvu/98

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Raschid et de son grand-vizir Giafar, errant la nuit dans les rues de Bagdad. Pour m’en tenir à l’exactitude d’une notice fidèle, je dirai que, du moins, des personnes d’une condition privée, mais d’un mérite reconnu, causaient volontiers avec M. Debas. J’en attesterais Amédée Hennequin, Louis de Ronchaud, Édouard Fournier, Xavier Marmier, mais ils ne sont plus de ce monde. Les plus familiers de M. Debas étaient deux prêtres, hommes excellents, l’un et l’autre, pour la doctrine et les mœurs, mais très dissemblables d’humeur et de caractère. L’un, M. Trévoux, chanoine de Notre-Dame, était petit et gros ; il portait sur ses joues ce vermillon pétri pour les chanoines par ces petits Génies que vit Nicolas Despréaux dans un songe poétique. Il mettait son étude et ses soins à découvrir de petits saints bretons et son âme était pleine d’une joie onctueuse. L’autre, M. l’abbé Le Blastier, aumônier d’un couvent de femmes, était de haute taille et de grande mine. Austère, grave, éloquent, il consolait par des promenades solitaires son gallicanisme attristé. Tous deux, passant sur le quai, leur douillette bourrée de bouquins, ils daignaient échanger des propos avec M. Debas.