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LES AFFINITÉS


Tout s’efface. Bientôt Cécile, revenue
De la silencieuse et fatale entrevue,
Va s’éveiller devant le parc tranquille et noir,
Mais rapportant du sein des magiques abîmes
Un écrin merveilleux d’épouvantes intimes
Qui dans son cœur ému s’ouvrira chaque soir.

II



Dans l’air dont l’éventail bat les ondes tiédies,
Le timbre italien des claires mélodies
Monte avec les parfums de la chair et des fleurs :
Et l’orchestre remplit de ses éclats sonores
Cette loge où Cécile, aux doux reflets des stores,
Songe, de diamants ornée et de pâleurs.

Depuis deux ans, pour mieux chasser de sa pensée
L’étrange souvenir dont son âme est blessée,
Elle cherche le bruit des soirs parisiens ;
Mais, dans le lourd repos de ses fatigues vaines,
Elle sent par instants lui monter dans les veines
Le regret généreux de ses effrois anciens.