Page:Anatole France - Thaïs.djvu/270

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une bouche sur la poitrine. De bonne foi, crois-tu que Jésus-Christ soit mort pour le salut de ces hommes ?

Une autre fois il eut une vision. Il vit dans une grande lumière une large chaussée, des ruisseaux et des jardins. Sur la chaussée, Aristobule et Chéréas passaient au galop de leurs chevaux syriens et l’ardeur joyeuse de la course empourprait la joue des deux jeunes hommes. Sous un portique Callicrate déclamait des vers ; l’orgueil satisfait tremblait dans sa voix et brillait dans ses yeux. Dans le jardin, Zénothémis cueillait des pommes d’or et caressait un serpent aux ailes d’azur. Vêtu de blanc et coiffé d’une mitre étincelante, Hermodore méditait sous un perséa sacré, qui portait, en guise de fleurs, de petites têtes au pur profil, coiffées, comme les déesses des Égyptiens, de vautours, d’éperviers ou du disque brillant de la lune ; tandis qu’à l’écart au bord d’une fontaine, Nicias étudiait sur une sphère armillaire le mouvement harmonieux des astres.

Puis une femme voilée s’approcha du moine tenant à la main un rameau de myrte. Et elle lui dit :