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Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 2, Hachette, 1893.djvu/228

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ferveur de leur noviciat à la vie publique, un ou deux zemstvos firent mine de porter leurs regards au delà de l’horizon provincial, le pouvoir central les rappela sévèrement à leur spécialité et à la modestie de leur mission. Vers 1867, les États provinciaux de Saint-Pétersbourg furent brusquement congédiés pour avoir osé exprimer un vœu illégal en faveur des libertés politiques, et le président de cette imprudente assemblée, un Chouvalof, proche parent du chef de la IIIe section, se vit, par mesure de police, éloigné de la capitale. La leçon n’a pas été perdue : depuis lors, nul zemstvo n’a essayé de s’élever au-dessus de sa sphère et de se guinder au-dessus de son rôle.

Quand, avec une inconséquence expliquée par le trouble de ses conseillers et la terreur des conspirations, l’empereur Alexandre II, dans l’effarement de la crise nihiliste, fit, en 1879 et 1880, appel au concours du pays et des différentes classes de la nation, la plupart des zemstvos ne répondirent que par des adresses banales et de stériles protestations de dévouement, qui ne pouvaient apporter au pouvoir aucune force réelle. Deux ou trois assemblées seulement osèrent, dans leur réponse à l’appel impérial, indiquer discrètement au gouvernement les réformes qui pouvaient l’aider à triompher de l’esprit de rébellion. Le zemstvo de Kharkof eut seul la courageuse franchise de déclarer que, la loi leur interdisant toute discussion sur les affaires générales, les zemstvos ne sauraient offrir leur appui au gouvernement, dans la lutte contre la révolution, que si leurs attributions étaient légalement étendues[1].

    été d’abord rigoureusement maintenus dans leurs frontières respectives et n’ont-ils obtenu qu’en 1879, et pour des motifs déterminés, la faculté de se concerter ensemble. On ne saurait s’étonner de ces défiances, alors qu’en France nos départements, qui sont huit ou dix fois plus petits et deux ou trois fois moins peuplés que les goubernies russes, ont été systématiquement maintenus dans leur isolement, et que nos conseils généraux n’ont obtenu que depuis 1871, et non sans restriction, le droit de prendre des mesures communes pour des intérêts communs.

  1. Le texte de cette délibération, que la presse russe de l’étranger osa seule