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Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 2, Hachette, 1893.djvu/248

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qu’aujourd’hui le propriétaire foncier reste en dehors de la commune où il réside. L’administration municipale appartenait entièrement aux classes dites urbaines (gorod-skiia sosloviia). Dans l’enceinte de la ville, le marchand, le bourgeois notable (potchetny grajdanine), le petit bourgeois (mêchtchanine), l’artisan, avaient seuls droit de cité[1]. Comme au moyen âge en Occident, toutes les libertés locales étaient exercées par un groupe déterminé, ce qui en faisait une sorte de privilège, spécial à une catégorie d’habitants. C’était là le système jadis en usage dans toute l’Europe, et Catherine le lui avait en partie emprunté. En Russie, du reste, toutes ces franchises locales, souvent assez étendues en droit, étaient restées débiles, nominales, presque illusoires en fait. Les corporations municipales n’usaient guère plus des droits qui leur étaient concédés, dans l’administration de la ville, que les assemblées de la noblesse n’usaient des prérogatives qui leur avaient été octroyées, dans l’administration du district et de la province.

Dans les villes en effet, le self-government n’a ni les mêmes racines ni la même sève que dans les villages des campagnes. Les institutions municipales des communes urbaines sont une œuvre moderne et artificielle, imitée de l’étranger, entièrement privée de la force que donnent les traditions et les mœurs. Dans la Russie primitive, les villes étaient loin de le céder aux villages en franchises locales ; elles avaient, elles aussi, leur assemblée, ou vetché, leurs chefs élus et leurs juges élus, leurs starostes ou leurs posadniks. De ces libertés municipales, accrues à la faveur des luttes intestines des princes apanagés, il était même sorti, chez quelques cités de l’ouest, telles que Novgorod la Grande et Psokf sa voisine, d’activés et turbulentes républiques municipales, non sans analogie avec les cités antiques ou les communes italiennes du moyen

  1. Sur toutes ces dénominations, voyez tome I, livre V, chap. iii.