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Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 2, Hachette, 1893.djvu/392

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un pays où les classes qui se livrent aux affaires sont encore souvent fort ignorantes et peu scrupuleuses, où la richesse même est loin d’être toujours un indice d’instruction et de moralité, un revenu de quelques centaines de roubles n’offre pas à la justice une bien solide garantie. Aussi n’a-t-on pas cru pouvoir se contenter du cens. Les gens que leur âge et leur fortune placent dans les conditions indiquées par la loi, sont inscrits sur la liste générale du jury (obchtchii spisok), mais cette inscription ne fait d’eux que des candidats aux fonctions de jurés. Sur les rôles ainsi dressés on choisit les hommes qui paraissent présenter le plus de garanties ; on forme ainsi une seconde liste (otcheredny spisok) qui comprend les noms parmi lesquels doivent être tirés au sort les jurés. Ce délicat travail d’épuration, le réformateur ne l’avait pas confié aux agents du pouvoir, il l’avait abandonné aux représentants élus des provinces, à une commission de ces zemstvos de district auxquels revient déjà le choix des juges de paix. Depuis, sous Alexandre III, en 1884, on a donné aux procureurs le droit de faire rayer des listes, par les tribunaux, toutes les personnes qui ne leur paraîtraient pas aptes à remplir cette fonction[1].

Il semble qu’un jury ainsi passé à un double crible ne doive être composé que d’hommes dignes d’y siéger. Les faits montrent qu’il est loin d’en être toujours ainsi, et

    bles dans les chefs-lieux de gouvernement, de 500 roubles dans les autres localités, ou bien encore il faut jouir d’un revenu d’au moins 500 roubles dans les capitales et 200 dans le reste de l’empire.

  1. Dans les provinces de l’ouest ; qui demeurent privées d’assemblées provinciales, les listes des jurés doivent être dressées par des commissions spéciales, composées de juges et d’arbitres de paix, de fonctionnaires de la police et de propriétaires fonciers. La revision de ces listes est confiée à une commission provinciale qui a le droit d’en rayer qui bon lui semble, sans avoir à mentionner les motifs de ses décisions. Le chiffre des Israélites portés sur les registres du jury doit être proportionnel au chiffre de la population juive du district, mais, en aucun cas, le chef du jury ne peut être Israélite. Le jury a été introduit, en 1864, dans le royaume de Pologne, mais avec l’obligation de se servir de la procédure et de la langue russes ; les récents règlements judiciaires l’ont refusé aux provinces baltiques.