Page:Andersen - Contes danois, trad. Grégoire et Moland, 1873.djvu/161

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

étant enfant et dont il lui avait fait cadeau. Là-dessus on se quitta.

Ib fut donc confirmé. Ib revint auprès de sa mère ; son père était mort. Il devint un habile sabotier. L’été, il cultivait le champ, épargnant à sa mère la dépense du laboureur.

De loin en loin seulement, on apprenait quelque chose de Christine par un facteur ou par un colporteur. Elle se trouvait très bien chez le riche aubergiste. Lorsqu’elle reçut la confirmation, elle écrivit une belle grande lettre à son père ; elle y mit des compliments pour Ib et sa mère. Elle y racontait que sa maîtresse lui avait fait cadeau de six chemises neuves et d’une belle robe qui n’avait presque point été portée. C’étaient là de bien bonnes nouvelles.

Le printemps suivant, on frappa à la porte de la mère d’Ib : ce n’était autre que le batelier et Christine. La jeune fille était venue en visite pour un jour ; elle avait profité de l’occasion d’une voiture de l’auberge envoyée à proximité de la maison de son père. Elle était jolie comme une demoiselle de la ville. Elle portait une belle robe qui lui allait très bien, car elle avait été faite à sa mesure : celle-là n’était pas une vieille robe de sa maîtresse.

Christine était donc là magnifiquement parée. Ib avait ses habits de tous les jours. Il ne put prononcer une parole. Cependant il prit la main de la jeune fille et la retint dans la sienne. Il se sentait bien heureux, mais il lui était impossible de mettre sa langue en mouvement : Pour Christine, c’était tout le contraire ; elle ne cessait de jaser et de raconter, et elle embrassa Ib sans le moindre embarras.

« Ne m’as-tu donc pas reconnue tout de suite ? lui dit-elle quand ils furent seuls ; tu es resté muet comme un pois-