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CHAPITRE III


LE VOISINAGE DU GÉNIE


I


LA COLLABORATION DE NIETZSCHE ET DE RICHARD WAGNER[1]



La nuance du sentiment qui liait Nietzsche et Richard Wagner, dans une affection pleine de dangers, ne peut s’apercevoir que par la plus difficile analyse. De certains problèmes généraux touchant les destinées de la civilisation ne se sont très probablement posés pour Nietzsche que par son commerce avec le grand musicien. Nietzsche reçoit de Wagner la direction de sa pensée : mais il la précise par la réflexion sur les œuvres wagnériennes. En cela Nietzsche, s’il est redevable à Richard Wagner, lui a été utile aussi. Impossible de croire que Wagner ait compté trouver en Nietzsche seulement un messager de sa gloire. Il était heureux d’avoir rencontré un disciple enthousiaste ; et flatté qu’un savant, un spécialiste des choses de la Grèce, comparât sa tentative

  1. L’histoire de l’amitié entre Nietzsche et Wagner est racontée jour par jour dans le nouveau livre de Mme Foerster : Wagner und Nietzsche zur Zeit ihrer Freundschaft, 1915. Toutes les lettres conservées de Nietzsche à Richard et à Cosima Wagner s’y trouvent reproduites. Il ne semble pas certain que toutes les lettres manquantes de Nietzsche soient détruites, comme on l’affirme à Bayreuth. Les lettres de Cosima, très belles, sont souvent très mutilées. La plupart des lettres de Richard Wagner nous étaient déjà connues par la biographie antérieure de Nietzsche.