n’est pas jusqu’aux mercenaires perses qui ne parlent comme les soudards du Camp de Wallenstein[1].
Shakespeare eut son tour, quand Koberstein solennisa son troisième centenaire, en 1864, par une conférence publique où Nietzsche récita le rôle de Percy Hotspur[2]. Les études antiques pourtant l’emportaient à Pforta. Nietzsche allait d’emblée aux écrivains dont la forme est plastique et passionnée, mais périodique et drue, à Salluste, à Tacite ; et, sur le tard encore, il s’enorgueillissait de l’étonnement qui s’empara de Corssen, quand ce bon philologue dut donner la meilleure note à son latiniste le plus novice, tant ce débutant avait su pénétrer jusqu’à l’esprit même de la prose sallustienne[3]. Eschyle, Sophocle, Platon, dont il adora le Banquet, les lyriques grecs lui furent familiers dès lors.
Se sentant stimulé fortement, on conçoit qu’il se soit fait peu à peu à sa vie recluse. Elle eut pourtant quelques amertumes. Il lui arriva d’être mis au cachot et privé de sortie pour une boutade caustique et un jour qu’il se livra, contre son habitude, à des libations trop copieuses[4]. La désapprobation de sa mère ajoutait alors à son chagrin. Très tendre, Mme Nietzsche multipliait pour lui les menues gâteries, mais n’épargnait pas les moralités. Les envois de pâtisseries voisinaient dans les colis avec les reproches affectueux. Il tâchait alors de ne plus mériter ces reproches, mais jugeait quelquefois que la discipline aussi de Pforta manquait de tact[5]. Des excursions dans les montagnes voisines tempéraient la monotonie de l’internat. Sa mère et sa sœur, le dimanche après-midi, le venaient voir quelques heures.