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cieux épanouissement, semblait un papillon courant sur des calices de fleurs »[1]. Le jeune Rhénan éprouve quelque étonnement des usages de la civilité pratiquée parmi les vieilles dames de la haute société de Naumburg. Bientôt des affinités philosophiques se découvrirent entre les deux amis, et elles s’approfondirent, malgré des dissentiments passagers, à mesure qu’ils poussèrent leurs études.

Ils s’acheminèrent vers l’Université ensemble, par le chemin des écoliers. Le séjour à Elberfeld, chez des personnes amies, permet d’amusantes observations sur les coutumes du pays. Lisbeth, à qui Nietzsche les envoie, fera ses délices de ces anecdotes humoristiques. S’il voit une jeune fille qui lui plaît, il ne manque pas d’avertir Lisbeth qu’elle lui ressemble[2]. Leur plus longue escale est le presbytère d’Oberdreis. Le père de son camarade en avait fait un pensionnat de jeunes filles presque luxueux, auquel présidait, avec tact et énergie, Mme Deussen. Ils passent là des jours heureux, entremêlés d’excursions dans le Westerwald. Puis, en octobre, descendant sur Neuwied, ils prirent le bateau à vapeur qui les conduisit à Bonn.

Au coin de la rue de Bonn et de la rue de l’Hôpital, une chambrette confortable louée chez le maître tourneur Oldag, fut tout le luxe que lui permirent les 25 thalers mensuels qu’il prenait sur son avoir paternel[3]. Son ami Deussen habitait à peu de distance, mais venait chez maître Oldag partager les repas de son ami. L’accueil de deux professeurs célèbres, les philologues Otto Jahn et Friedrich Ritschl, pour lesquels ils avaient des lettres de recommandation, fut peu encourageant. Nietzsche, pour

  1. P. Deussen, Erinnerungen, p. 15.
  2. Corr., V, 61.
  3. P. Deussen, Erinnerungen, p. 19.