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CHAPITRE PREMIER

LA FAILLITE DE LA SCIENCE PRÉSENTE



Une foule turbulente de jeunes snobs, Français le plus souvent, va puiser dans Nietzsche, depuis quinze ans, les lieux communs de sa polémique contre les abus de l’érudition et ses desséchantes méthodes. Elle découvre sur le tard chez un philosophe allemand des ressources de polémique dont elle nuse ni avec le même talent ni pour les mêmes fins désintéressées. Si l’on pense faire de Nietzsche l’auxiliaire imprévu de Ferdinand Brunetière et si de la critique sévère nietzschéenne, infligée à la science présente, on veut tirer des arguments contre toute science, on perd son temps. Nietzsche ne veut pas nous faire retourner à une foi périmée pour toujours. Il nous mène à la liberté de l’esprit.

Pour Nietzsche, l’inculture présente fait avorter toutes les organisations de l’instinct pratique. Par une conséquence naturelle, l’œuvre la plus vaste de l’instinct de connaître, la science, doit aboutir à un semblable avortement. Le savoir était né du besoin d’aider la vie. Toute la vie se corrompt, si le savoir qui la guide est frappé de décadence. Voici qu’au moment de songer aux réformes, nous retrouvons le problème entre tous redoutable, le