Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/107

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jour qu’il passa à la forteresse, il se mit à la gymnastique, d’après le système extrêmement rationnel d’un Allemand nommé Muller, qui l’intéressait beaucoup. Il se déshabilla complètement ; et à l’ébahissement de la sentinelle inquiète, il fit soigneusement les dix-huit exercices prescrits.

Comme propagateur du système Muller, il était très satisfait de voir le soldat suivre ses mouvements. Bien qu’il sût qu’on ne lui répondrait pas, il dit à l’œil qui apparaissait au guichet :

— Voilà qui fait du bien, frère, ça vous donne des forces ! Voilà ce qu’on devrait vous faire faire au régiment, ajouta-t-il d’une voix persuasive et douce, pour ne pas effrayer le soldat, sans se douter que celui-ci le prenait pour un fou.

La peur de la mort se manifesta en lui progressivement, comme par chocs : il lui semblait que quelqu’un lui donnait d’en bas de violents coups de poing au cœur. Puis la sensation disparaissait pour revenir au bout de quelques heures, et chaque fois, elle deve-