Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/128

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L’idée qu’il ne terminerait probablement pas la partie n’arrêtait pas Werner. Le matin du dernier jour, il commença par corriger un coup qui ne lui avait pas réussi la veille. Les mains serrées entre les genoux, il resta longtemps assis, dans l’immobilité ; puis il se leva et se mit à marcher en réfléchissant. Il avait une démarche particulière ; il penchait un peu en avant le haut du corps et frappait des talons avec force ; même quand la terre était sèche, ses pas laissaient une trace nette. Il sifflotait doucement une mélodie italienne peu compliquée, ce qui l’aidait à réfléchir.

Mais voilà qu’il haussait les épaules et se tâtait le pouls : le cœur battait à coups rapprochés, tranquilles et égaux, avec une force sonore. Comme un novice jeté en prison pour la première fois, il examina attentivement la cellule, les verrous, la chaise vissée au mur et se dit :

« Pourquoi ai-je une telle sensation de joie, de liberté ? Oui, de liberté : je pense à l’exécution de demain et il me semble qu’elle