Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/159

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— Monsieur, si on attaquait les soldats du convoi ?… Qu’en pensez-vous ?

— Non, répondit Werner.

— Pourquoi ? Il vaut mieux finir en combattant. Je donnerai un coup, on m’en donnera un autre et je mourrai sans m’en apercevoir…

— Non, il ne faut pas, dit Werner.

Et il se tourna vers Ianson :

— Pourquoi ne fumes-tu pas ?

Le visage desséché de Ianson se plissa pitoyablement, comme si quelqu’un avait tiré les fils qui mouvaient les rides de sa figure ; l’Estonien sanglota sans larmes, d’une voix blanche :

— Je ne peux pas fumer. Ah ! ah ! ah ! Il ne faut pas me pendre. Ah ! ah ! ah !

Tout le monde se tourna vers lui. Tania, pleurant abondamment, lui caressait les bras et rajustait son bonnet :

— Mon ami, ne pleure pas, mon ami ! Mon pauvre ami !

Tout à coup les wagons s’entrechoquèrent et ralentirent leur marche. Les con-