Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/160

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damnés se levèrent, mais se rassirent aussitôt.

— Nous sommes arrivés, dit Serge.

Subitement, ce fut comme si l’on avait pompé tout l’air de la voiture. Il devint difficile de respirer. Les cœurs dilatés pesaient dans la poitrine, montaient vers la gorge, battaient désespérément, et le sang, dans sa terreur, semblait se révolter. Les yeux regardaient le plancher trépidant, les oreilles écoutaient les roues qui roulaient toujours plus lentement, roulaient encore, puis s’arrêtaient doucement.

Le train stoppa.

Une étrange torpeur envahit les condamnés. Ils ne souffraient pas. Ils semblaient vivre d’une vie inconsciente. Leur être sensible était absent ; seul son fantôme se mouvait, parlait sans voix, marchait en silence. On sortit. On se rangea par deux, en aspirant l’air frais de la forêt. Comme dans un rêve, Ianson se débattait gauchement : on l’arracha du wagon.

— Nous irons à pied ? demanda quelqu’un presque gaiement.