Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/53

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seul, et surtout pour un bonhomme comme toi !

— Alors, quand ? insista Ianson.

Il n’était pas offensé de ce qu’on ne voulût pas prendre la peine de le pendre, lui tout seul ; il ne croyait pas à ce prétexte, persuadé qu’on ne différait la date de l’exécution que pour le gracier ensuite.

— Quand ? Quand ? reprit le gardien. Il ne s’agit pas de pendre un chien, qu’on entraîne derrière un hangar et qu’on expédie d’un seul coup ! Est-ce ça que tu voudrais, imbécile !

— Mais non, je ne veux pas ! repartit Ianson avec une grimace joyeuse. C’est elle qui a dit qu’il fallait me pendre, mais moi, je ne veux pas !

Et, pour la première fois de sa vie peut-être, il se mit à rire, d’un rire grinçant et stupide, mais terriblement gai. Il semblait qu’une oie se fût mise à crier. Étonné, le geôlier regarda Ianson, puis il fronça les sourcils : cette gaîté bête d’un homme qu’on devait exécuter insultait la prison, le sup-