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Page:Andre-Chermy-La-Chair-est-faible-1926.djvu/6

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la maison tranquille !… Quels étaient donc ces voyageurs qu’il n’avait pas vus au dîner ? Sans doute un jeune ménage arrivé dans la soirée.

— Eh bien ! Ça va être amusant !… maugréa-t-il.

Il ajouta :

— Enfin ! Tâchons de ne pas y prendre garde.

Et il se replongea dans son discours, répétant :

Le ministre regrettera éternellement que les devoirs de sa charge

Mais la voix moqueuse reprenait :

Ça doit être épatant
Ah ! dis, chéri ! Joue-moi-z’en !

Anatole se bouchait les oreilles. Il marchait de long en large, parlant plus haut, lançant des lambeaux de phrases comme pour couvrir le couplet qui l’horripilait :

Le moteur à soufflets, cette merveille… est aujourd’hui

Et la voix vengeresse répliquait :

Une trompette… en bois.

Si bien qu’au bout d’un quart d’heure Anatole, perdu, constatait avec désespoir qu’il mélait la chanson à son discours et répétait que « le gouvernement était en bois » et que le ministre avait déclaré, en parlant des moteurs à soufflets : Ah ! dis, chéri ! Joue-moi-z’en !

Il avait la tentation de frapper à la cloison, mais il se retint et décida de se coucher en se disant : Demain, je demanderai à changer de chambre.

Avant de s’endormir, il essaya cependant encore de reclasser ses idées et voulut une dernière fois relire son discours.