Page:Andry - Traité des aliments de carême, 1713, tome I.djvu/310

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l’ignore. Mais ce que Galien raconte là-dessus, est digne d’attention. Un jour, dit-il, qu’étant encore Ecolier, j’étois allé me promener à la Campagne, avec deux jeunes gens de mon âge, nous nous trouvâmes dans un village, où le pain étoit devenu si rare, que des Païsans chez qui nous fumes pour souper, ne purent nous présenter, au lieu de pain, que du froment boüilli dans de l’eau, & assaisonné d’un peu de sel. Comme le chemin nous avoit donné de l’appetit, nous mangeâmes ce qu’on nous présenta. Mais nous ne fumes pas long-tems sans nous en répentir : car peu aprés il nous sembla que nous avions dans l’estomac une masse de terre. Nous passâmes la nuit dans cet état ; & le lendemain loin d’en être quitte, nous ressentimes de grandes douleurs de tête, nous ne discernions les objets que comme à travers des nuages, & il ne nous fut pas possible de rien prendre de tout le jour, tant nous étions dégoûtez & languissans. Nous voulûmes sçavoir de ces Païsans si le mets qu’ils nous avoient donné leur étoit ordinaire, & comment ils s’en trouvoient ; ils nous répondirent qu’ils en usoient souvent, à cause de la disette du pain ; mais que cette nourriture leur étoit toujours trés-lourde, & qu’ils avoient