Page:Andry - Traité des aliments de carême, 1713, tome II.djvu/355

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aux Religieux, & qu’on feroit bien de ne pas souffrir qu’ils usassent jamais. N’en déplaise néanmoins à nôtre Auteur, son raisonnement n’est pas concluant. Saladin, Sultan d’Egypte, fit donc d’abord nourrir ces deux Moines avec de la viande & de l’eau ; mais voïant leur vertu inébranlable, il les fit nourrir avec du poisson & du vin, & ils succomberent : donc la continence a tout à craindre du côté du vin. Il y a plus d’un défaut dans cette conclusion ; le premier, c’est de supposer que ces Moines ne succomberent, qu’à cause du changement que l’on fit dans leur nourriture ; car comment s’assûrer que sans cela ils n’eussent pas succombé ? Pour avoir eu la force de résister une premiere fois, l’a-t-on toûjours de résister une seconde ? L’autre défaut, c’est que quand même il faudroit attribuer à la maniere différente dont ces Moines furent nourris ensuite, la foiblesse qu’ils eurent de succomber, l’Anonyme suppose ce qui est en question, de prétendre, comme il fait, que tout doive être mis ici sur le compte du vin. Car puisque le Sultan, n’aïant pû parvenir à son dessein, en les faisant nourrir avec de la viande, leur fit donner du poisson à la place, & qu’ils succomberent alors : est-il raisonnable de dire, sans le prouver,