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V


Quelquefois le travail, la taciturne étude,
À qui j’ai demandé l’oubli de mon chagrin,
M’entraînant, par delà ma sombre inquiétude,
Vers le pic lumineux et gelé du Dédain.

Je crois, en contemplant de cette solitude
Toutes mes passions dans un vallon lointain,
Que je puis vivre libre en cet air pur et rude,
Sur ce sommet d’argent, de cristal et d’airain.

Mais comme un voyageur debout au front des cimes
Où le froid étincelle en spectacles sublimes
Sent le sommeil fermer ses yeux endoloris,

Ainsi, sur ma hauteur glaciale et sereine,
Je sens mon cœur faiblir, et bientôt je suis pris
Du besoin de dormir sur une épaule humaine.