Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t1, 1905.djvu/46

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Nous sortons du port, nous prenons la mer !
La flamme du mât de vent frais est ivre,
De son foc tendu le navire est fier ;
Et si, loin de tous, le marin se perd,
Il meurt du destin qu’il a voulu vivre !


L’Adolescent.

Entends, maître, entends-les ! Ce sont les matelots
Joyeux de retrouver l’aventure des flots !
Ils chantent leur départ ! Écoute ce qu’ils disent !
L’ouragan qui déchire et les écueils qui brisent
Les voiles et les flancs du vaisseau ballotté,
Ne sauraient les tenir sur ce bord abrité,
Dans la vie exiguë et terne qu’ils dédaignent !
La torpeur de nos sorts est le danger qu’ils craignent !
Leurs regards, que l’ampleur des horizons accroît,
Se sentent mutilés dans notre espace étroit,
Et captifs et pareils au goëland sauvage
Qui vit, l’aile coupée, au bord d’un marécage !
Quelle allégresse excite, exalte et bat leurs chants !
Comme ils semblent heureux, robustes et vaillants !