Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t1, 1905.djvu/53

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour vaincre et posséder les âmes et les chairs.
Du soupir d’une femme au murmure des mers,
Elle a tous les appâts et toutes les embûches !
Voici bientôt l’instant, ô fils, où vers tes ruches
Vont rentrer tes essaims de leur quête du jour ;
Tes brebis devant qui ton chien joyeux accourt,
Tes chèvres au pas lent, lourdes de leurs mamelles,
Vont revenir toucher, de leurs têtes fidèles,
La main du maître assis sur le banc familier ;
Et ton grand bœuf roussâtre, oublieux du bouvier,
En mugissant devant la porte de l’étable,
Te cherchera d’un œil pacifique ; ta table,
Pour le repas du soir, a le lait et les fruits,
Le broc d’étain attend, prêt à puiser aux muids
Le limpide clairet rafraîchi par la cave ;
Et l’odeur du jasmin de ton porche est suave !
C’est un présent des Dieux ! restes-en satisfait,
Ô fils ; ne leur sois point ingrat de ce bienfait !
Plutôt que de courir t’exposer aux orages,
À ceux qui t’ont permis, sous ces quelques ombrages,
L’abondance et la paix de ces quelques arpents.
Offre l’huile, le lait, l’or du miel, et répands
La joie et le souhait et la reconnaissance
De la part qu’à tes ans assigna leur clémence.